Les Collèges du travail
par Jean Gosset, Esprit, juin 1938 (extrait)
Ce sont ces Collèges qui avaient délégué à leur premier congrès [mars 1938] leurs représentants, ouvriers ou professeurs. Cette rencontre, où l’on respirait une si authentique atmosphère d’enthousiasme et de jeunesse, joignait à l’étude des problèmes généraux d’éducation ouvrière des questions plus spéciales (bibliothèques, loisirs, etc.) ; mais, sans être explicitement prévu au programme, un thème, sans cesse répété et approfondi, imprégnait les exposés et les discussions : la formation et le développement de l’esprit critique. C’est par là, disait-on, qu’on échappera aux dictatures ; la propagande est « le contraire de l’éducation ». C’est ici un des principes essentiels du C. C. E. O. en général fidèlement appliqué. Non que l’objectivité de l’enseignement y soit sans défaillances : les appréciations littéraires sont souvent étroites, le sens de l’histoire un peu romanesque et l’interprétation parfois arbitraire ; en économie le Plan de la C. G. T. est présenté avec un peu trop de complaisance (et c’est bien naturel si l’on songe que plusieurs rédacteurs des cours ou des brochures ont été mêlés à l’élaboration du Plan !) Mais il ne faut pas oublier que le C. C. E. O. commence seulement son effort, que certaines réactions nécessaires contre la culture bourgeoise sont encore imparfaitement « digérées », que ses inspirateurs et ses adhérents ont conscience du travail de formation qu’ils doivent accomplir sur eux-mêmes ;
qu’enfin et surtout l’objectivité ne s’identifie ni avec l’indifférence et la nullité, ni avec le point de vue bourgeois ou traditionnel. Aussi le C. C. E. O. mérite-t-il beaucoup d’éloges sur ce point et non pas l’hostilité systématique que lui montre l’article cité, bien peu objectif lui-même, de la Revue de Paris. Les Collèges du Travail cherchent à conduire la classe ouvrière à la maturité, ce qui suppose, estime-t-on, que la pure propagande n’ait plus de prise sur elle. (Comme on voudrait voir les milieux bourgeois aussi exigeants pour eux-mêmes !).
En particulier les Collèges ont toujours résisté avec succès aux tentatives d’accaparement politique ; s’il est exact que le C. C. E. O. est influencé par la tendance « anarchosyndicaliste » de la C. G. T., il représente ce qui dans cette tendance se rapproche le plus du personnalisme ; et il témoigne du pluralisme qui caractérise le mouvement syndical ; pluralisme incompris le plus souvent des noncégétistes.
Les communistes se sont parfois montrés très hostiles aux Collèges, mais ailleurs ils y ont collaboré. Et cette diversité, outre les nécessités tactiques, justifie la C. G. T., quelque désir qu’on ait de voir la classe ouvrière plus largement unie encore dans une telle oeuvre, de réserver l’accès des cours à ses adhérents.
En particulier les Collèges ont toujours résisté avec succès aux tentatives d’accaparement politique ; s’il est exact que le C. C. E. O. est influencé par la tendance « anarchosyndicaliste » de la C. G. T., il représente ce qui dans cette tendance se rapproche le plus du personnalisme ; et il témoigne du pluralisme qui caractérise le mouvement syndical ; pluralisme incompris le plus souvent des noncégétistes.
Les communistes se sont parfois montrés très hostiles aux Collèges, mais ailleurs ils y ont collaboré. Et cette diversité, outre les nécessités tactiques, justifie la C. G. T., quelque désir qu’on ait de voir la classe ouvrière plus largement unie encore dans une telle oeuvre, de réserver l’accès des cours à ses adhérents.
Jean Gosset
Comments are closed.